Jean-Charles Valladont à Rio, avec une passion pour la chasse - J.C. Valladont

De notre envoyé spécial à Rio,
Si vous avez déjà calé un rendez-vous Tinder avec dame nature en Sologne, vous avez peut-être croisé un type en train de bander son arc en pleine forêt. Ce que vous ne saviez sans doute pas, c’est qu’il s’appelle Jean-Charles Valladont et qu’il est notre meilleure chance de médaille dans l’épreuve individuelle de tir à l’arc à Rio. Opposé ce lundi au premier tour à l’Ivoirien René-Philippe Kouassi (20h13 à Paris), le quatrième mondial aurait en d’autres circonstances pu profiter de ce beau jour de vacances pour s’adonner à son autre passion : la chasse à l’arc.

" - Jusqu’en 1995 ce n’était pas légal mais ça l’est désormais", présente-t-il d’emblée. Il faut avoir un permis de chasse normal avec juste une journée supplémentaire de formation. La chasse à l’arc est en train de se démocratiser énormément, il y a des fédérations dans tous les départements. » Nous l’ignorions. Il enchaîne : « C’est une chasse qui est plus dans l’air du temps car plus propre, plus écologique que la chasse à la carabine où tu tires le gibier à 200 mètres et boum. Là, t’es obligé de t’approcher à moins de 20 mètres si tu veux toucher. »

Trois types de chasses à l’arc

Ses cibles ? Principalement des sangliers et des chevreuils : « Quand je tue 10 sangliers ou cinq chevreuils dans l’année, je suis content. » Et le petit gibier ? « Il faut un chien et je n’ai pas le temps d’en dresser un. » Viser une médaille aux Jeux, c’est un peu chronophage.
Allez, ne tournons pas autour du pot plus longtemps. Chasser à l’arc, comment ça marche ?
  • « Il y a la chasse en battue avec des chiens et des traqueurs qui rabattent le gibier. Mais c’est pas ce qui est le mieux, c’est très difficile de mettre une bonne flèche sur un animal en mouvement. »



  • « Il y a la battue silencieuse avec 10, 15 ou 20 archers en place. Comme il n’y a pas de chien, le gibier ne t’entend pas arriver, du coup tu as le temps pour lui mettre une flèche. »
  • « Tu peux aussi le faire en individuel. Soit tu te mets dans un arbre à un endroit où ils viennent souvent manger, soit tu en cherches de loin à la jumelle, dans un champ de blé et tu commences une approche. Tu peux mettre une ou deux heures pour arriver à 20-25 mètres sans faire fuir l’animal. »
Clairement, notre archer, c’est la troisième option qui le fait vibrer. « Ce qui me plaît, c’est que tu dois être en alliance avec la nature, raconte Legolas. Tu dois faire corps avec le truc, approcher le gibier le plus près possible n’est pas une quête courte, tu es beaucoup dans l’attente. » Et le moindre craquement de brindille peut être fatal. « Même sur une cible immobile à 30 mètres, si tu fais un bruit en tirant le temps que la flèche parte il aura entendu le bruit de ton arc et tu ne vas pas toucher les zones vitales car il aura bougé. »




Jean-Charles Valladont à la chasse - J.C. Valladont
Mais quand même, être un sniper dans la vie, ça doit aider pour la chasse le week-end non ? « Pas du tout. D’ailleurs je ne suis pas meilleur que les autres chasseurs. Évidemment, je suis capable de toucher le cœur ou le poumon à 70 mètres sur une cible qui ne bouge pas, mais dans des conditions réelles, il y a toujours une branche, un arbre, quelque chose qui gène. C’est totalement différent. » Il utilise d’ailleurs pour la chasse un autre arc, avec système de poulie, pour ne pas déformer son geste « sportif » avec des mauvaises habitudes de tirs prises le dimanche.
Mais il reconnaît certains points communs, quand même :
« Quand t’as fait une heure et demie en rampant pour approcher le gibier, au moment de tirer t’as un rythme cardiaque comme une finale de championnat du monde. Tu te retrouves dans les mêmes situations, les mêmes gestions de stress. Parfois en compétition, je me dis pour m’apaiser que c’est comme si j’étais dans le bois, tout seul face à mon sanglier. »




Jean-Charles Valladont à Rio - Natacha Pisarenko/AP/SIPA
Dernière question : « Quel aurait été ton programme demain si tu n’avais pas été à Rio ? »
« Si je pars avec mon équipe, ça donnerait ça :
  • Lever à 6h30
  • Un petit café
  • Un gros repas saucisse-œuf-pâté-terrine tous ensemble vers 9h
  • Chasse de 10h à 17h
  • A partir de 17h récupération et découpe du gibier. J’adore faire ça. D’ailleurs, je pense à me reconvertir dans la boucherie-charcuterie. »
Ce serait encore plus facile avec une médaille olympique. Et puis ça serait un bel hommage à Louis Debray, champion olympique du tir à 50 mètres sur sanglier (si si) aux Jeux de Paris 1900.